Nous avons tous un rapport personnel à Dieu. Il y a ceux qui le nomment en lui disant qu’ils n’y croient pas. C’est la position de Saint-Thomas : « prouve-moi que ce que tu dis est vrai. » Bien sûr Dieu ne répond pas puisque, dans cette histoire que nous nous racontons, ce sont nous les Parleurs, qui ne cessons de nous poser des questions sur notre réalité et le sens de nos existences. Or, sans que nous en ayons conscience, de cette activité permanente d’échanges, naît un monde imaginaire qui, par une mystérieuse opération de l’esprit, se cristallise en matière, laquelle nous semble dense alors même qu’elle est essentiellement composée de vide : « Le corps est le barattage du lait de l’esprit », disent les bouddhistes.
Mon rapport personnel à Dieu est de me voir comme une image inversée de Lui : Dieu est silence absolu, je suis celui qui parle.
Quelle merveille que la parole ! Il m’arrive de rêver de pouvoir la porter à un niveau d’absolu égal au silence de Dieu. Parler pour le seul le plaisir de tisser un lien entre « nous ». Donner la primeur au chant de la parole sur le sens des mots et laisser les yeux nouer les fils entre eux jusqu’à se découvrir chacun au regard de l’autre.
Alors le temps du sérieux, du « moi je » qui cherche à comprendre, s’efface à cette aire de retournement devant l’avènement du « Je » qui joue pour le seul plaisir de jouer.
Petite annonce : « cherche compagne de jeu avec qui parler pour ne rien dire, simplement partager un plateau d’huîtres autour d’un verre de vin blanc. Inviter tous les silences de l’univers à se joindre à nous. Éterniser le temps jusqu’à sa dimension d’instant présent ».